Liban – Beyrouth – Attentat du « Drakkar »

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Dimanche 23 octobre 1983

Attentat contre le poste militaire français « Drakkar » à Beyrouth

Le 23 octobre 1983, une camionnette piégée explose contre le poste français « Drakkar » au sud de Beyrouth, causant la mort de 58 parachutiste français, et tuant plusieurs civils libanais. L’attentat a vraisemblablement été mené par le Hezbollah et la milice Amal islamique.

Deux attentats-suicides coordonnés et extrêmement meurtriers

Le matin du 23 octobre aux alentours de 6h20, une camionnette contenant 250 kg d’explosif force le barrage d’entrée du poste français « Drakkar » de la Force Multinationale de Sécurité de Beyrouth (FMSB), située dans le quartier Mar Elias au sud-ouest de la capitale libanaise. L’immeuble se trouve dans une zone peuplée par des Chiites et des Druzes, populations alors majoritairement hostiles à la présence militaire française au Liban.

Le conducteur de la camionnette piégée précipite son véhicule contre le rez-de-chaussée du bâtiment, un ancien hôtel de neuf étages où sont alors postés 96 militaires français. L’attentat suicide fait s’effondrer le bâtiment, ne laissant qu’un amoncellement de débris de cinq mètres de haut.

F-83-472-Lc66© ECPAD

carte drakkar

Quelques minutes plus tôt, un autre attentat-suicide, perpétré au camion piégé, avait eu lieu dans l’enceinte du quartier général des Marines américains de la FMSB, situé à proximité de l’aéroport international de Beyrouth.

Des victimes françaises et libanaises

L’attaque visant le poste « Drakkar » a tué 58 militaires français, dont 55 provenaient du 1er Régiment de Chasseur Parachutiste (RCP), et trois du 9ème RCP. Outre les Français, l’épouse du concierge libanais de l’immeuble ainsi que ses cinq enfants sont également décédés dans l’effondrement du bâtiment. Les efforts des secouristes et des soldats français et libanais ont néanmoins permis de sauver 41 parachutistes et d’extraire les cadavres des décombres.

Le camion piégé ayant frappé le quartier-général des Marines, quelques minutes auparavant, a tué 241 militaires américains, ce qui constitue l’attaque la plus meurtrière pour les États-Unis depuis la Seconde guerre mondiale.

L’attentat du Drakkar a provoqué un choc considérable en France car le pays n’avait pas connu de perte militaire aussi lourde depuis la guerre d’Algérie. Dès le lendemain, le Président de la République, François Mitterrand, s’est rendu sur place.

Le 2 novembre 1983, un Hommage national a été rendu aux 58 militaires décédés dans la cour des Invalides, en présence du Président de la République et des plus hautes autorités. Le chef de l’État avait alors décoré les victimes de la Médaille militaire à titre posthume.

Pour visionner l’intégralité de la retransmission de la cérémonie d’Hommage national, voir ci-dessous (source INA) :

Une stèle commémorative a été apposée sur les lieux de l’attentat, qui est aujourd’hui un terrain vague situé dans un quartier résidentiel. Un mur mémoriel a également été construit dans l’enceinte de la Résidence des Pins à Beyrouth, portant les noms des 58 militaires tués le 23 octobre 1983 ainsi que ceux de tous les Français morts dans l’exercice de leurs fonctions durant la guerre civile libanaise. L’attentat du Drakkar est par ailleurs commémoré chaque année par les armées françaises et les autorités civilo-militaires à Beyrouth. Par exemple, la ville de Pamiers, où En 2011, un rond-point a été rebaptisé « Drakkar » avec une stèle qui vient rappeler la tragédie, rend hommage chaque année aux soldats morts pour la France.

Un attentat probablement mené par le Hezbollah et Amal islamique

Les deux attentats du 23 octobre 1983, ont été revendiqués par trois factions peu connues, dont l’Organisation du djihad islamique et le Mouvement de la Révolution islamique libre. Il est vraisemblable que ces groupuscules aient servi de paravents pour des organisations armées actives au Pays du Cèdre, et agissant comme relais de l’Iran dans la guerre civile libanaise.

L’attentat du Drakkar est probablement le résultat d’une coopération ad hoc entre les principales factions hostiles à l’action de la France au Liban, en particulier la Résistance islamique au Liban (bras armé du Hezbollah), soutenu par Téhéran, et le mouvement chiite Amal islamique. L’hypothèse la plus communément admise est que l’Iran cherchait par cet attentat à répliquer aux ventes d’armes françaises à l’Irak, alors en guerre contre Téhéran, mais également à punir la France dans le cadre du différend relatif à Eurodif. Enfin, il s’agissait de provoquer le départ de la FMSB, effectif en 1984, afin que les milices pro-iraniennes bénéficient d’une plus grande liberté d’action au Liban.

Deux noms de responsables terroristes sont fréquemment cités comme ayant contribué à l’attentat du Drakkar : Hussein MOUSSAOUI, chef de la milice Amal islamique, laquelle aurait fourni les moyens logistiques et humains, et Imad MOUGHNIEH, l’un des principaux formateurs militaires du bras armé du Hezbollah, et cadre supposé de l’Organisation du djihad islamique.

Imad MOUGHNIEH est accusé d’avoir planifié de nombreux attentats anti-américains, antisémites et anti-israéliens dans les années 1980 et 1990, dont les attaques de Buenos Aires en 1992 et 1994 contre l’ambassade israélienne et un centre culturel juif. Il aurait également participé à l’enlèvement de plusieurs otages français au Liban dans les années 1980. Le 12 février 2008, Imad MOUGHNIEH meurt dans l’explosion d’une voiture piégée à Damas. La thèse d’une élimination ciblée conduite par les services secrets israéliens et américains est régulièrement évoquée.

Néanmoins, le temps n’a pas permis de lever les doutes sur les causes de l’explosion. La thèse officielle est décrite dans un rapport confidentiel défense. La commission d’enquête libanaise conclura à deux attentats exécutés de façon similaire et par ailleurs les enquêtes menées par les autorités françaises aboutissent aux mêmes conclusions. Ceci alors que plusieurs témoins directs qui soutiennent ne pas avoir vu de camion et font valoir qu’aucun camion n’a été retrouvé dans les décombres n’ont jamais été entendus au cours de l’enquête. De même, les survivants ont été mis à l’isolement par l’armée, avec interdiction de parler à quiconque. Selon un document de l’Office national des anciens combattants (ONAC), le camion est « soulevé dans les airs, il retombe à 7 mètres de distance. Les sentinelles n’ont pas eu le temps de réagir ». Il n’y aurait donc pas eu de tirs, mai un camion projeté en l’air, que personne n’a retrouvé. Pour d’autres survivants, le bâtiment aurait été miné.

Seul le déroulement de l’attentat contre le bâtiment des marines américains a été établi par un tribunal fédéral du District of Columbia en 2003 : le véhicule a été retrouvé et le nom du kamikaze est connu : Ismail Ascari, de nationalité iranienne. Plusieurs juges américains ont également condamné l’Iran, en vertu de la loi américaine qui permet de punir les pays étrangers (FSIA), à verser plusieurs millions de dollars en dommages et intérêts aux victimes et proches de victimes de cet attentat, dès lors que l’Iran avait donné des instructions au Hezbollah afin qu’il fasse exploser une voiture piégée à l’entrée de l’ambassade. Du côté français, Le ministère de la défense convient que les zones d’ombre autour de l’attentat ne peuvent que « renforcer la peine des victimes ». Si le 23 octobre 2013, pour la première fois, un voyage à Beyrouth sur les lieux du drame, était organisé par le ministère de la défense, il a dû être annulé en raison du conflit syrien.

Pour télécharger le fichier PDF de la fiche attentat, cliquer ici

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